Les Soirées de Paris est une revue lancée en 1912 par Guillaume Apollinaire, André Salmon, André Billy, André Tudesq et René Dalize. Il semble qu’à l’origine de ce lancement, figure l’affaire du vol de la Joconde par Vincenzo Perrugia en 1912, pour lequel Apollinaire a été soupçonné et même emprisonné une semaine à la Santé. C’est pour le réconforter que ses amis, le journaliste André Billy en tête, lui ont proposé de co-fonder la revue. Le titre est choisi en référence ironique aux soirées naturalistes de Zola (Les Soirées de Médan). On y publiait des textes de création, des textes critiques, de la poésie, des faits divers et des chroniques.
Écrire, créer, publier, produire des pièces hétérogènes, sans académisme, comme une forme de témoignage ou de résistance à un contexte vécu comme arbitraire, partial, du moins largement imparfait : voilà ce qui rassemblait les cinq amis. C’est ce qui rassemble aujourd’hui les cinq artistes de l’exposition autour d’une forme de capture du temps présent, dans toutes ses ambivalences, qu’elle prenne la forme photographique ou sculpturale. La plupart des œuvres présentées saisissent des indices rituels, nous mettant sur la piste de la manifestation d’une réalité cachée, à la manière d’épiphanies. Oscillant entre culte et coutume, les artistes explorent la transition spirituelle, linguistique et technologique que nous vivons, dont on ne sait véritablement à quel moment nous figurons.
Julien Carreyn (né en 1973, vit et travaille à Paris) dans sa série d’instantanés, ii (2019), capture des mises en scène familières dont il brouille toute identification précise par une modification de la surface photographique, produisant des effets de trouble oniriques.
Doris Guo (née en 1992, vit et travaille à NY) qui interroge dans ses sculptures et installations les rituels familiers et religieux, présente Guestbook, une sculpture en bronze mimant un geste consacré de superstition.
Les trois œuvres d’Em Rooney (née en 1983, vit et travaille à NY), produites pour l’exposition, pouvant être vues à la fois comme des lunes ou des croix, évoquent des scènes a priori ordinaires, mais qui révèlent la question de la vitalité de notre présence dans l’environnement en perpétuel changement.
Hayley Silverman (née en 1986, vit et travaille à NY) dont le travail explore les outils de surveillance politique et morale qui régissent notre société, présente une série spécifique de sculptures détournant l’iconographie religieuse : Repatriation of the aura (2019).
Naoki Sutter-Shudo (né en 1990, vit et travaille à Paris et Los Angeles) conçoit une série de sculptures intimes et conflictuelles, qui associent des formes, des couleurs et des références narratives semblant préexister à ses œuvres.